Transition 7 - Alerte des scientifiques

2.6 Alertes des scientifiques et changement du statut des ressources

La recherche scientifique aide à une meilleure compréhension des phénomènes et processus œuvrant dans la société et l’environnement. On estime par exemple que 60 % des services des écosystèmes sont en train d’être dégradés ou sont utilisés de manière non durable (Speidel et al, 2009).

En d’autres termes, les ressources sont plus rapidement consommées que la Terre ne les régénère : l’homme utilise le « capital » de la nature et pas seulement ses « intérêts ».
En effet, la Terre a besoin d’un an et quatre mois pour régénérer notre consommation annuelle (Global Footprint Network data, 2008). Il en résulte une raréfaction de certaines ressources naturelles, comme par exemple les terres cultivables ou l’eau.

Selon les estimations des Nations Unies de 2011 (Overshoot Index, 2011), tandis que certains pays comme le Gabon ont une autosuffisance supérieure à 1 500 %, d’autres comme le Koweït, le Japon, l’Union européenne ou les Etats-Unis atteignent respectivement seulement 4,4 %, 14,2 %, 47,6 % et 53,7 % (et c’est le cas de la majorité des pays).

Ces analyses des changements environnementaux et écosystémiques ont donné aux scientifiques les arguments permettant d’anticiper des évolutions probables vers un monde plus pauvre en écosystèmes et en biodiversité, où la nourriture, la qualité de l’eau, les conditions sanitaires, et donc les conditions de vie seraient limitantes pour une humanité en croissance démographique.

Le Stockholm Memorandum en 2011 (co-signé par une vingtaine de Prix Nobel) et le Scientific Consensus on Maintaining Humanity’s Life Support Systems in the 21st Century en 2013 font appel à l’ensemble de la communauté internationale pour agir et traiter d’une manière coordonnée les cinq défis globaux suivants :

  1. le dérèglement climatique,
  2. la perte de diversité écosystémique et l’extinction accélérée d’espèces,
  3. la pollution,
  4. la croissance démographique et
  5. la sur-consommation des ressources.

L’idée de la nécessité d’une approche intégrée est à retenir. Parmi les mesures avancées, on trouve notamment l’éducation et l’allocation équitables des ressources. Ce genre de consensus permettrait à terme une gestion mondiale des ressources (Stiglitz, 2010).

L’égalité des ressources. Pour permettre à chacun de subvenir à ses besoins vitaux, il apparaît donc nécessaire de définir les ressources comme des biens communs, « aussi inaliénables et fondamentaux que nos droits et nos libertés » (Grange, 2012). Ces biens communs incluraient l’eau, l’air, le sous-sol, la biodiversité, mais aussi les lieux de vie non pollués, la sécurité sanitaire, les savoirs, la culture et les différentes formes de socialité.

En partant de là, la liberté politique doit inclure la libre disposition des biens fondamentaux communs (considérés comme un Bien premier, Bien public) : la définition d’un bien commun est comprise « non comme un donné naturel, mais comme un idéal politique ».

Prenons l’exemple de l’alimentation. La nourriture, de ressource locale elle est devenue marchandise privée trans-nationale. Il est temps de repenser son statut : un bien commun global (Vivero Pol, 2013).

Plus généralement et en pratique, la force publique ne serait pas le gérant des biens communs, mais le garant de leur statut non appropriable et de leur gestion durable et équitable (Grange, 2012). En cela, référence est faite aux travaux de John Rawls et Amartia Sen : les biens fondamentaux, en tant que Bien public, doivent faire l’objet de législations, de revendications et de réflexions dans un cadre politique.

Des comptes devront être rendus aux citoyens sur le choix des dépenses publiques, basé sur un effet redistributif incluant une protection sociale et une éducation de qualité. Cela ouvre la voie à une éthique de la redistribution.

Extrait de « Pour une démocratie socio-environnementale : cadre pour une plate-forme participative « transition écologique »
Les auteurs : Clappe et al, 2014
In : Penser une démocratie alimentaire / Thinking a food democracy, vol2, Collart Dutilleul F, Bréger T (Eds.), Inida SA, San José,pp 87-112

Article publié ou modifié le

15 septembre 2014