Il y a le feu dans nos assiettes
Article paru dans "Presse Océan" le mercredi 27 novembre 2013
Des chercheurs rappellent l’urgence d’une démocratie alimentaire
Le programme de recherche Lascaux basé à Nantes a présenté cinq propositions pour mieux nourrir la planète.
En 2024, il sera presque trop tard. La population mondiale et ses 8 milliards d’habitants ne « pourront plus taper dans l’équilibre des écosystèmes sans précipiter leur ruine. » Ioan Negrutiu, le directeur de l’Institut Michel Serres, ne mâche pas ses mots quand il parle de l’avenir alimentaire de nos enfants.
« Quand on regarde notre assiette, on voit la mauvaise image du monde »
Et son appel est largement partagé depuis hier à Nantes où les 400 chercheurs de 40 pays qui participent au programme Lascaux que dirige le Nantais Philippe Collart Dutilleul, présentent leurs « propositions pour mieux nourrir la planète » dans le cadre de rencontres internationales visant à « penser une démocratie alimentaire ». La première idée a trait à la question de l’accaparement des terres par les sociétés étrangères notamment dans les pays en développement.
« Il est urgent, explique Philippe Collart Dutilleul, de poser un modèle de texte fondé sur le même principe que le texte que l’Unesco a voté en 2005 pour la défense de l’exception culturelle. Il permettra de défendre l’accès de tous à l’agriculture en soutenant la diversité ». « Puis, continue le juriste, il faut donner une place plus importante à la FAO, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, dans l’esprit même de la charte signée par 53 pays en 1948 à La Havane qui fixait comme objectifs le développement économique, la sécurité alimentaire, et la préservation des ressources naturelles ». Pour les chercheurs du programme Lascaux, il faut encore appliquer clairement les règles de la propriété intellectuelle aux espèces végétales pour éviter la bio piraterie. Il est enfin nécessaire de faire connaître la situation au plus grand nombre.
Les limites du modèle du XXe siècle
« Il faut que chacun sache bien que pour qu’il mange une pizza, on utilise des tomates produites en Andalousie et transformée en Chine avant de revenir sous forme de sauce. » « On se rend compte des limites du modèle du XXe siècle, conclut Olivier de Schutter, rapporteur des Nations Unies. Il est grand temps de redonner à chaque région les capacités de se nourrir elle-même ». Un principe que Dominique Tremblay, vice président du conseil régional, partage totalement. Mais pas forcément les grands de ce monde !
J.-D. Fresneau
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25 mars 2014